Qu’est-ce que l’épuisement professionnel chez l’adolescent ? 

Apparu pour la première fois, sous la plume de Harold. B Bradley 1970, puis de celles du psychanalyste Herbert J. Freudenberger et de la psychologue Christina Maslach, le “burn-out (ou “syndrome d’épuisement professionnel”) est de plus en plus étudié depuis 2 décennies. Majoritairement connu dans le monde salarial, il touche pourtant d’autres catégories de la population… En effet, et si les enfants, malgré l’image d’innocence et de joie incarnée que l’on s’en fait, étaient aussi victimes de ce phénomène d’épuisement émotionnel, physique et psychique ?

Maslach et Leiter décrivent le burn-out comme “l’écartèlement entre ce que les gens sont et ce qu’ils doivent faire”. Pour les enfants ou les adolescents, en moyenne âgés de 6 à 18 ans, quelles sont les causes d’un tel phénomène ? Alors que, au cours de ces dernières années, de nombreuses entités ont pris la parole à ce sujet (France 2, lors de son émission Télématin du 05 novembre 2016, “Santé – Quand le burn-out touche les enfants…” ou encore France Culture dans “les Pieds sur Terre”, “Ados en Burnout”, le 15 octobre 2018” et de multiples autres média et personnalités), ce dernier reste vague, à la fois pour les familles et pour les scientifiques eux-mêmes.

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Les facteurs du “teenage burnout”

Mais commençons par le commencement : quels éléments de la vie d’un jeune peuvent déclencher ce “teenage burn-out” ? L’état d’épuisement professionnel chez l’adolescent peut avoir plusieurs facteurs :

Scolaire : Comme le montre une étude sur la santé et le bien-être chez les jeunes, environ 23% des adolescents français se disent stressés par leur travail scolaire (Currie et al., 2012). Dans de nombreuses institutions, notamment de la région parisienne, la pression scolaire est effectivement très forte. Il n’est pas rare de voir les adolescents crouler sous leurs devoirs à rendre, leurs leçons à connaître ou encore le stress de leurs interrogations. Cette situation n’est guère simplifiée par la dureté de certains professeurs, recherchant toujours plus de rigueur et d’excellence sur les bancs de leurs classes. Ils n’hésitent pas à saturer de rouge la copie d’un élève de 3ème, parfois même soulignant les erreurs de ce dernier devant tous ses camarades. Les notes, les bulletins, les classements, les conseils de classe… Tous ces concepts en viennent à effrayer certains élèves, chez qui naît peu à peu ce que les psychologues appellent “la phobie scolaire”.

Parental : ce n’est pas tout. Il est de plus en plus reporté que les enfants subissent beaucoup de pression dans le cadre familial également : pression de réussite sociale notamment, liée au désir des parents de voir leur enfant “être le meilleur de sa classe” et, plus tard, “réussir sa carrière”. Dès leur plus jeune âge (dans les établissements français les plus reconnus, par exemple), les enfants sont mis en compétition les uns contre les autres. Ce phénomène est d’ailleurs fortement favorisé par la tendance des parents à comparer leurs enfants à leurs camarades de classe et souvent, à la maison, à leurs frères et soeurs (“ton frère avait une meilleure moyenne que toi, à l’époque.”). Pour conséquences, l’enfant victime de cette pression familiale pourra tenter de redoubler d’efforts afin de davantage plaire à ses parents, jusqu’à s’épuiser à la tâche, ou bien perdre très rapidement goût à l’école et se rebeller violemment. 

Lié à l’angoisse de l’avenir : en bref, 47% des 15-18 ans se disaient “souvent sous pression” en 2014, selon une enquête Ipsos/Pfizer ! En France, le système éducatif entraîne les élèves à exceller dans le domaine intellectuel tout particulièrement : savoir écrire, compter, lire, dès le primaire ou encore apprendre des poésies et des leçons par coeur. Peu de places sont laissées aux temps de détente, de créativité ou de loisirs physiques, à l’inverse du système éducatif allemand, par exemple, où les après-midis sont réservées à ces fins. L’enfant français a donc davantage de chance d’être angoissé car, comme l’affirme Gisèle Georges, pédopsychiatre : “notre société [française] fabrique des enfants qui sont dans l’obligation d’optimiser au maximum leur temps de vie : ils doivent obtenir de bons résultats scolaires, pratiquer plusieurs activités en dehors de l’école, être compétitifs au quotidien : c’est beaucoup trop pour eux !” ; tout cela en seulement 24h, alors qu’ils passent déjà 5 jours sur 7, 7h par jour en moyenne (à l’exception du mercredi) à l’école. Et oui. Pensons alors au jeune qui s’imaginera devoir tenir ce rythme pour les 60 prochaines années de sa vie : comment ne pas être pris d’angoisse ?

Un manque de sommeil : S’il est finalement bien connu que les adolescents doivent bénéficier de bonnes nuits de sommeil parce qu’ils sont en pleine croissance et dépensent beaucoup d’énergie, il est cependant de plus en plus vrai aujourd’hui que ces heures de repos sont endommagées par un stress chronique ou par l’utilisation immodérée des nouvelles technologies (ordinateurs, tablettes, téléphones, consoles de jeux, etc. – introduites de plus en plus tôt dans les chambres à coucher). 

Les jeunes de 18-34 ans sont les plus “accros” aux NTIC (Les nouvelles technologies de l’information et de la communication), selon le rapport de l’Institut du Sommeil et de la Vigilance, 2016. Ils sont plus nombreux à être somnolents dans la journée et leurs réveils nocturnes sont plus longs. De plus, il passent plus de temps que les autres devant leur écran le soir et moins de temps à l’extérieur pendant la journée. Ils s’exposent donc peu à la lumière du jour et, de ce fait, leur sommeil est encore plus impacté par la lumière des écrans.

Alors, quelles en sont les conséquences ? Ces facteurs facilitant grandement l’épuisement physiologique et psychologique ainsi que la sensibilité à différentes situations (divorces, attentes parentales élevées, pression sociale) des jeunes (élèves de collège, de lycée ou en études post bac), ces derniers peuvent ne plus trouver de sens à ce qu’ils font et se poser de nombreuses questions : “Puis-je faire mes propres choix ? Pourquoi suis-je obligé d’aller tous les jours à l’école ou à l’université, si je n’apprécie pas ? A quoi sert d’étudier telle matière alors que je ne sais même pas ce que je veux faire plus tard ?”, etc. Ils peuvent finalement avoir un sentiment d’impuissance face à leur vie, surtout lorsqu’elle est choisie pour eux par leurs parents (inscriptions à tel club de sport, au conservatoire et autres activités extrascolaires, direction des études et suivi des résultats attendus par ces dernières). Enfin, ayant parfois l’impression de ne bénéficier d’aucun soutien, ni parental ni scolaire, les émotions des jeunes adolescents et leur équilibre quotidien peuvent donc être mis à rude épreuve et déboucher sur de plus graves conséquences, comme la dépression, touchant en moyenne 11% des jeunes de 15 ans à 24 ans, soit 1 sur 10, selon le Baromètre Santé 2017.

burn-out des adolescents

Comment prévenir le burn-out des jeunes ? 

C’est, bien évidemment, aux parents et à l’école d’être vigilants face à ce syndrome d’épuisement professionnel. En effet, si l’on se remet d’un burn-out en milieu professionnel en prenant un congé pour se reposer et en étant bien accompagné, il est important de veiller à en faire autant pour les plus jeunes. Le soutien est la principale aide qu’un enfant puisse recevoir : de la part de ses parents ou bien d’un professionnel de la santé.

Il est normal qu’un adolescent ait de nombreuses choses à faire : il est en pleine période d’apprentissage et ses parents veulent le voir évoluer au mieux, l’aider à être prêt pour le monde futur et développer ses compétences. Mais pour ce faire, au lieu d’ajouter de la pression sur les épaules de cet être en pleine croissance, il est plus judicieux de soutenir cette dernière ! Et si les enfants avaient besoin d’être davantage guidés dans leur travail scolaire ? Et s’ils avaient de meilleures méthodes de gestion de leur temps et de leur organisation ? Et s’ils étaient mieux accompagnés sur leurs choix d’orientation, le plus tôt possible, en sachant qu’ils doivent être capables de formuler un premier voeu dès le passage du brevet des collèges ? Et si, à la place des remarques négatives écrites au stylo rouge sur leurs devoirs, les corrections “à la française” finissaient par de jolies touches de vert et de reconnaissance par le professeur de la progression déjà effectuée ? Et si le dialogue était davantage institué à la table familiale, permettant aux jeunes de se sentir soutenus et davantage en confiance ? Aujourd’hui, ses questions sont laissées à la libre méditation et à la responsabilité de tous.

Un équilibre entre le travail scolaire d’un adolescent, l’activité sportive nécessaire pour sa santé et le repos (sans technologie dans la chambre, au moins 1h avant de dormir !) n’est pas forcément inné pour tous les jeunes : ils ont besoin de leur entourage (leurs professeurs et leurs parents), attentif, pour les aider à construire leur futur, à travers l’écoute, le dialogue, la compréhension et l’orientation. C’est d’ailleurs le bon moment pour une discussion au coin du feu avec votre enfant, votre frère, votre soeur ou vos amis, vous ne trouvez pas ? C’est ainsi que de nombreux cas de “teenage burn-outs” pourront être prévenus et d’autres pris en charge rapidement. En cette période de fin de vacances et de préparation à la rentrée scolaire, il est plus impératif que jamais d’accompagner les jeunes, du primaire aux études supérieures, vers plus de sérénité face au travail et à leur futur, grâce à la transmission et la mise en place d’un meilleur équilibre dans leur quotidien. Ils seront alors moins sensibles au stress, lié à une pression qui existera toujours (dans les études ou le milieu professionnel) et auront davantage confiance en eux et en ce qu’ils font, pour vivre pleinement leur vie.


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